Marie-Philippe Deloche, Bleu de juillet, Toujours la langue veut dire
Bleu de juillet
Derrière le paysage
attentive,
aux failles
aux fractures
aux plis
Je suis les lignes
de faiblesse,
l’équilibre des papiers
froissés
Je tremble pour recoudre
lier
les mots au bleu de juillet
Derrière le paysage
attentive,
aux failles
aux fractures
aux plis
Les sutures suivent les bords
des déchirures
des paroles
murmurées
Je tisse, détisse,
Pénélope,
conjure le temps et l’espace,
l’usure des corps
Je tremble pour recoudre
lier
les mots au bleu de juillet
Un phrasévibré
qui vacille
l’élégance propre aux guenilles
Coudre
rapprocher les deux bords
lectures
écritures chiffonnées
La langue qui se recompose
accueille le bruissement des êtres
des plus humbles
aux plus savants
Je tremble pour recoudre
lier
les mots au bleu de juillet
Le tragique troue le texte
les nuages
traverse le tissu des mots
Ils le referment
aussitôt
Tissu céleste
bleu de juillet
1.
Toujours la langue veut dire
insiste
pulse
la mer le ciel jamais fini
les humeurs de nuages ourlés
le jeu des mécaniques disjointes
les secrets sans partage
le ratage
Vivre dans une bibliothèque
de correspondances
et d’écarts
pour le hasard et les épreuves
d’une vie
Des guillemets volettent autour
comme des fantômes
au-dessus d’un corps alangui
2.
Toujours la langue porte en elle
cette dynamique cachée
qui mène
aux changements de mondes
De débordements en éclipses
le désir s’exalte et s’étire
mais il va
Il ignore l’histoire qu’il construit
3.
Toujours la langue veut dire
insiste
pulse
La langue portée par les hommes
organise des formes libres
avant de les disperser
dans un souffle
Redéplier la langue le jour
comme un vêtement àrepasser
qu’on a déjàtrop replié
trop reprisé
et qui s’effiloche et se troue
pendant la nuit
Pure électricitédu réel
Toujours la langue veut dire