Recueil insond­able, si riche en chemins qui se croisent, se dédou­blent, se mul­ti­plient vers un tout har­monieux présent mais jamais atteint, vers une cos­mogo­nie où réal­ité et imag­i­naire ne font qu’un.

Le poème peut être lu à par­tir de n’importe quel vers qui joue le rôle de cen­tre, qui s’élargit vers le poème et vers le recueil en son entier comme des cer­cles con­cen­triques quand la pierre jetée à l’eau est dev­enue ce mot par quoi tout arrive. Nous retrou­vons l’Anneau de Chill­i­da qui de fer est devenu cette eau trou­ble où toute poésie s’inscrit aus­si forte et durable qu’un anneau de métal qui est dans tout, que tout appelle dans sa pré­cieuse unité.

On voudrait ne lire qu’un vers par jour et l’emporter la journée durant en l’écoutant et le pal­pant au fond de soi comme un sourire et dire mer­ci d’exister à cette beauté que nous frôlons exprimée par la douceur de ses images et de ses oxy­mores. Le lecteur flotte dans la musique des mots éper­dus de présent, de sou­venirs reliés à cette mytholo­gie tou­jours présente à ceux qui en font des sym­bol­es pour approcher aujourd’hui. D’emblée nous pra­tiquons la poésie, nous sommes ini­tiés par la teneur dense et ferme d’un vers qui s’étire dans toutes les direc­tions de la sen­si­bil­ité et de la pen­sée de l’aube à l’aurore, de la nuit au jour entre tous les points car­dinaux de la mémoire qui fuse à chaque poème par­mi l’ombre, la lumière, toutes les forces qui se rassem­blent en nous sous la con­duite d’une baguette mag­ique trem­pée dans le miroir de nos paroles. Des frag­ments, des resser­re­ments, la terre, le ciel se dila­tent  et livrent leur présence de l’illusion et de la cer­ti­tude mêlées de réel allant de la dérive à l’ancrage, du présent à l’absence le tout dans une nature prég­nante en chaque poème, non pas déco­ra­tive mais en avant, en action ressen­tie au plus pro­fond de soi, indissociable. 

Mar­i­lyne Bertonci­ni, L’An­neau de Chill­i­da, Ate­lier du Grand Tétras.

Nous sommes au bord du quo­ti­di­en ne bas­cu­lant jamais dans le sur­réel, sur cette ligne qui fait frémir toute pen­sée qui s’est déjà dépassée vers l’acceptation du monde, vers cette sen­sa­tion d’éternité , cette douceur que les mots soulèvent en s’irradiant l’un l’autre de leurs sonorités dis­crètes et bienveillantes.

Présentation de l’auteur

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Jean-Marie Corbusier

Jean-Marie Cor­busier se con­sacre à l’écriture et à la musique. Pro­fesseur de français, il se pas­sionne pour la lin­guis­tique et l’étude de la struc­ture des langues au par­ler rare et très dif­férent. Il a pub­lié presque une ving­taine de fois des recueils de poésies, prin­ci­pale­ment aux édi­tions du Tail­lis Pré. Il est aus­si chroniqueur pour dif­férentes revues dont le Jour­nal des poètes. Dernières pub­li­ca­tions aux Edi­tions  Le Tail­lis Pré (Châte­lin­eau) : Une neige peinte de pas (2011), Dans le jour soulevé (2013), La lampe d’hiver (2015), Le livre des oub­lis et des veilles (2017) , L’air, pierre à pierre (2018). La poésie met la langue dans un état cri­tique, elle est une source de pen­sées qui va par et pour elle-même dans une lec­ture où cha­cun l’invente, cette part indi­vidu­elle est la force du poème, son degré de vérité.