Michelle Hourani, Au bord du ciel, un chemin

2018-01-09T17:09:28+01:00

Venue de loin

 

Les fenêtres de la ville se coif­f­ent pour la nuit
Le silence se lève sur la pointe des pieds
Seule, je veille et m’enferme
Dans ton sommeil
Ici, tu oublies tes habits de sang
Les mor­sures de ton visage
et ce long tunnel
d’où tu es sor­tie fragile.
Désor­mais l’ob­scu­rité est décapitée
incré­d­ule mais reconnaissante,
Je bois la lumière d’une source de vie
Qui chante fraîche,
debout à tra­vers toi.

 

 

La nuit

 

Un lit entre deux dormeurs

L’aube sur le lit

Le lit près de la fenêtre

La fenêtre sous l’arbre

Un nuage au-dessus de l’arbre

Un songe dans les nuages.

 

 

Désespoir

 

On a brisé la boule du bonheur
Où l’on vivait comme dans un rêve
Une fille aux grands yeux de fée
Etait ensanglantée
Tournée vers les murs som­bres de son cœur
Jeunesse défig­urée dans un été pâle
Sourires oubliés dans les bras du tressaillement
Que faut-il pour devenir fragile ?
Un brin imper­cep­ti­ble du destin
Qui change de voie
Et s’oriente vers les ténèbres d’à côté
Des sources inquiètes mon­tent en moi
Et j’y trébuche en plein jour
Dans ce sen­tier exécrable
Où même l’écho est décoloré
On ne nous recon­nait plus
Car même nos ombres
Ressem­blent à des loups de rancune
Hurlant cha­cun seul dans la nuit.

 

 

Petit bateau

 

Un bateau en papier
Dort sur le lit d’une rivière
Il pêche
Les songes
En regardant
Les poissons
En forme de nuages.

 

 

 

Violence

 

Le vent gifla la mer
Qui se soule­va, se cambra
Puis s’abattit d’un coup

La vague se pres­sa et mordit
De ses mil­liers de dents
Le rocher

          Il s’ef­fri­ta sur la grève
          En d’in­fi­nis galets

          Les san­glots d’un espace lointain
          Reten­tirent sur les rives de l’horizon

          Et le temps qui regar­dait ces instants
          Som­bres de violence
          Pres­sa la marche mor­bide du temps

          Le soleil coula dans son disque sanguin
          La lune épousa sa lumière de froidure

          Que les lâch­es n’ig­norent pas la loi des ténèbres
          Gravée dans la sen­tence de nos Destins.

 

 

Communion

 

Le soleil se lève tranquille
Cha­peauté d’un nou­veau jour
Je le salue
D’un signe de main,
Il me répond à sa façon
Une dernière étoile à disparaitre
Avant le matin,
Clig­note timidement
Dans le bleuissement
De mes yeux.

 

 

L’accident

 

Du haut de la vallée
Elle ne vit que sa peur
Elle eut beau hurler
Tout pas­sa telle une lueur

          La chute se fit rapide
          Mais elle put apercevoir
          Der­rière la vit­re limpide
          La mort habil­lée de noir

          Effrayée elle fer­ma les yeux
          Puis lança désespérée
          Un cri qui troua les cieux
          Décon­cer­tant la mort qui souriait

          Quand on la reti­ra d’en bas
          On ne vit pas que gisaient là
          Deux ailes blanch­es ensanglantées
          Repliées, pais­i­bles de l’avoir sauvée.

 

 

Jeunesse d’aujourd’hui

 

Le vis­age gan­té de confiance
Elle a des répliques de silex
Les mains aux abois
Des orages dans ses rires
De la pous­sière dans ses rêves
La chair crevée de désillusions
Une ombre gavée de stupéfiants

          Et l’en­nui meur­tri qui
          La pour­suit de ses griffes.

 

 

Présentation de l’auteur

Michelle Hourani

Michelle ACCAOUI HOURANI est une écrivaine libanaise qui cul­tive une pas­sion pour la langue française et en par­ti­c­uli­er pour la poésie. Elle a déjà trois recueils pub­liés en France  et un en Bel­gique, et fait par­tie de la SACEM à Paris puisque deux de ses poèmes ont été mis en chan­son  par des  com­pos­i­teurs français.

En 2016, par­tic­i­pant  au  con­cours Europoésie  à Paris, elle décroche le 2ème prix de la fran­coph­o­nie, pour l’ensem­ble de ses poèmes et le 3e prix de la fran­coph­o­nie pour ses poèmes courts et haïkus.

 

 

Michelle Hourani
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