Mon enfance m’étrangle

Mon enfance m'étrangle
encore certaines nuits je respire
si mal que ça
me réveille comme si le cordon
d'ombilic me serrait le cou

Ma mère m'a souvent raconté que
petit enfant
je m'étouffais dans mon lit
couché tête-bêche par un cauchemar et
sous les draps je hurlais : « Peux pas respir ! Peux pas respir ! »

Chez mes grands-parents maternels
enfoui sous un édredon d'ogre
dans un grand lit paysan
je m'étouffais d'angoisse rien qu'à entendre
les sabots des chevaux de l'autre côté du mur

C'étaient les sabots de la Mort
le raclement de ma Naissance
le souvenir de cette noyade
ou de cette pendaison
dans le ventre de ma mère

Fœtus j'avais tout entendu
mais sans rien comprendre
Enfant je compris tout
mais sans rien entendre
que des mots mal dissimulés
— des mots étranglés—.