Notre songe 26 à 30
notre Songe
26
apres
nos destinées
fermèrent
les portes
qui estaient de métal doré
faict à fueillage
aussi
percé à jour
*
un soupir
comme la voulte
et le vuyde
remply de larmes de cristal
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27
nostre vie
rendoit une clairté
de plusieurs diverses coleurs
donnant ceste lumière à nos baisers
*
en l’espace
au dessus de nostre soupir
y avoit un daulphin
taillé en demybosse
de pierre galactite
nageant en la mer
portant un beau silence
sur son dos
qui s’esbatoit
d’une lyre
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28
la vie
et autres choses espandues
le long des rives du ruysseau
*
un silence
mais seullement
la verdure naturelle
des fueilles enrichies
de leurs fleurs blanches
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29
orenges et citrons
les uns meurs
les autres verdz
un soupir estendant les aelles
*
l’eau
tumbant dans un bassin d'or
remontoit par souffles secrets
au mesme lieu
dont elle estoit sortie
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30
les personnages
de nos songes
sont élancés
expressifs
les plis des robes
tombent avec grâce
*
les oliviers clairsemés
au maigre feuillage
font place aux chênes touffus
puissants et tourmentés
dont le savant dessin
est directement
emprunté
à nos beaux soupirs
Matthieu Gosztola
En hommage au devenir, parce que passé et présent de la langue sont là en chaque ici et maintenant et demain, ces poèmes sont faits – principalement – de mots ayant trouvé – beau – domicile dans l’ouvrage suivant :
Francesco Colonna, Le Songe de Poliphile [traduction de Hypnerotomachia Poliphili], présenté par Albert-Marie Schmidt, Paris, Club des libraires de France, Les libraires associés, 1963 (reproduction en fac-similé de l'édition de Paris, J. Kerver, 1546, parue sous le titre Hypnerotomachie ou Discours du songe de Poliphile).