Opus 9 : Agnés Varda, La Pointe courte (suite)

 

1

La Pointe-courte ? Moi aussi, je te vois et je jouis, dit-il. Moi aussi, je te touche et je pleure, dit-elle. Égalité retrouvée.

 

2

Trois mondes coexistent : les personnes, leurs voix, les personnages.

Les personnes, une communauté de pêcheurs et leur famille logés dans des cabanes au bord de l’étang de Thau, ont la photogénie du travail de Walker Evans dans Louons maintenant les grands hommes, avec James Agee à la plume.

Les voix, postsynchronisées, n’appartiennent pas aux lèvres de ceux que l’on voit – mais elles ont même origine sociale.

Bob créée par Vidal Sassoon dans les années 60 – bourgeois de l’art, aliénés par la passion, en prenant acte, signant contrat tacite et, chose faite, allant finir leur nuit ailleurs.

Chaque monde est sans modulation harmonique et s’inscrit dans un cadre fixe. Monospace et monocordie.

C’est beau et froid comme un glaïeul blanc dans un verre à eau. L’été n’est sensible que dans un certain éclat exaspéré de la lumière.

Seuls les chats, imperceptibles, vont en nombre de l’un à l’autre – et l’insistance de leur passage a sans nul doute une incidence sur la lente venue au jour et à notre conscience de l’égalité sous-jacente qu’Agnès Varda fait courir entre les mondes ?