Entre ses doigts frêles
elle a saisi un grain rosé de l’aube
et l’a planté dans son limon de femme.
S’est tenue là, patiente
à attendre que viennent l’inouï du jour
et la tendresse des hommes.
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Il a posé son regard ébloui
sur la ligne d’horizon
sur les branches
et tous les bourgeons
d’elle,
à se vouloir oiseau
à se sentir des ailes
et dans le bleu naissant
et les prières d’avril
a fait danser ses doigts
sur la matière vivante
et l’a mise en mouvement
dans le souffle de l’air.
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Elle est née d’un dialogue entre eux
indicible
elle avance à pas de loup et parfois elle rampe dans l’ombre
froide des herbes bleues et l’odeur des églantines.
à l’affut de tout ce qui se dresse vers le vif du ciel
et en survie dans la chair des mots
elle le guette
parfois elle est un poème enroulé autour de lui comme le
souffle et le cuir cinglants d’un lasso
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J’habite la lumière au naissant du jour
et la matière qui fait la terre et les hommes.
J’habite chaque grain de peau et son histoire
les bouches pleines du jus des fruits
les bouches pleines des autres bouches
et celles qui ont soif.
J’habite le souffle de mon enfant
le battement des cils et des coeurs
et l’humanité de ceux qui s’essoufflent.
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À tous ces mots fondus sous la langue
ces mots-bonbons, ces mots-baisers
au goût de l’autre,
À ces mots coincés entre deux dents,
à tous ceux crachés à la face du monde
et à ceux restés dans la gorge serrée,
à tressaillir.