Pierre Tanguy, Silence hôpital
Vivre la maladie, en poète
Petit recueil mais, on le sait, le nombre de pages n’a rien à voir avec la densité. Dans l’univers de l’hôpital, tout compte de son poids de souffrance. Pour en parler, il serait indécent de tomber dans le mélo, d’en rajouter. L’amenuisement, la faiblesse physique exigent l’économie des mots et cela ne saurait déplaire à Pierre Tanguy, familier de l’art du haïku.
Hospitalisé le temps d’un cycle entier de saisons, le malade dont l’identité demeure incertaine (est-ce Pierre Tanguy ou l’un de ses proches ?) passe de longs moments couché sur le dos tel un hanneton épuisé. Il en profite pour observer quand ses forces le lui permettent ce monde clos où le temps s’écoule comme le goutte à goutte ou s’évalue aux minutes passées dans l’ascenseur avant de rejoindre la salle d’opération. Attentif à repérer ce qui échappe aux biens portants, comme les tâches de couleur qui tranchent avec le blanc des lits et des mains sortant des blouses blanches.
Pierre TANGUY, Silence hôpital, éditions La part commune, février 2017, 83 pages, 13 €.
Près du lit
le soleil couchant
dans les poches de perfusion
L’aiguille dans la veine-
le sang bleu
Soudain rouge
Rouge encore, la pointe de la cigarette d’une femme en peignoir…
Et c’est avec la même sensibilité, la même discrétion qu’est évoquée la douleur de l’épreuve, de la séparation
Une tête penchée
au creux d’une épaule
deux cœurs navrés
Des sanglots
au fond du couloir
– quelqu’un vient de mourir
Circulant dans l’hôpital, le poète radiographie les paysages bretons accrochés aux murs et nous fait partager le quotidien dans lequel l’extérieur s’immisce par petites touches, notamment par le biais des saisons.
Après l’automne, ses châtaignes, ses marrons et ses feuilles mortes, vient l’hiver sur lequel il ne s’attarde pas. Puis, c’est enfin le temps des nids, des iris, de l’élagage du camélia
Le recueil s’achève sur cette renaissance et cette interrogation :
Fera-t-il beau cet été ?