Il n’y avait personne encore.
La Pangée sortait à peine de l’océan, des sacs de nuit pendus à ses flancs. Il ne se peut pas que nous en ayons souvenir. Que nous retrouvions l’éclat sur la pierre du premier rayon de soleil.
Nous le cherchons pourtant. Il nous manque certains matins où, dans les remous de la mémoire, les anneaux des mondes perdus glissent les uns sur les autres. Nous prenons notre respiration profondément, comme si à notre tour nous sortions des eaux. (Quelqu’un ricane : l’air en ce temps-là n’était pas respirable).
Nous nous écartons de nos ténèbres, de nos années révolues, de nos vies antérieures, nous tentons de remonter jusque là où il n’y avait pas de vie.
Pourtant, il y eut émergence, il eut séparation. Il y eut rivage, il y eut tracé d’un dessin à la surface du globe.
Il y eut le jour et la nuit sur un continent aveugle. Etait-il trapu, compact, ou déjà traversé de failles ?
Et quand le premier caillou s’est-il détaché ?
poème extrait de CAILLOUX