Sibylle Bolli, Ce qui t’espère
I
ânonnement
jours recuits
tu enjambes les mots gris
accumulés aux fissures
tu sais les roses
qui gémissent à la nudité du désert
il suffirait de prendre forme
puiser aux chaumes
aux ventres des futaies
il suffirait de tirer naissance
du brin oublieux
frémissant
sous le dais du grand ciel
II
sous tes pas défleuris
que le temps essaime
cette couleur sombre
qui estompe les feux
affamé d’été
aux joues de mûres
soif de ces eaux
où musait ton reflet
tu écoutes s’assoupir
la vague du premier jour
trembles au passage
amoureux de l’aile
redevenu seul
III
quel crépuscule
grisaille à pas de loup ?
tu cherches
dans l’ossuaire des mots
éclairs de sang de sève
offre ta chair
à la morsure
le chemin s’effrite
sous ta main
tu restes ainsi
fendillé de silence
comme arbre
traversé d’orage
IV
il s’agira
d’ébranler la pierre
à la seule buée des mots
comme un roi découronné
rendu aux bouches de la nuit
le goût du ciel vivra
aux lèvres veuves
ton cœur
assailli de neige
évidera le tombeau
V
ou l’enfant
ou la promesse
rassemble l’horizon
à tes bras d’argile
tu décages l’oiseau
qui bouleverse le poème
transparence d’un ciel
qui t’advient
rien n’est plus
que ce chemin sans traces
où rosée pèse sur les os
où ton empreinte délivre