spasp, Aphrodite Lamaï et Verkoff l’enjôleur
Maldoror est de retour !
Ce livre titré Aphrodite Lamaï et Verkoff l’enjôleur est un OENI. Je me permets cet acronyme puisque l’auteur les cultive à foison, pas seulement les LCD, GPS et autres DGPS (Differential Global Positioning System), mais aussi le CDFJ, soit la Composition Formelle Des Jours, aussi la cellule AP qui est celle de l’Acquiescement Participatif dans laquelle, après examens divers suivi du feu vert des gouvernants, un couple est enfermé pour convoler pendant une période de deux mois...
Par OENI, j’entends un Objet Écrit Non Identifiable. L’éditeur présente cet ensemble comme un recueil de nouvelles, j’y verrais aussi bien un journal fantastique intime, une science-poésie fiction... Car cet ensemble de courts textes me fait le plus souvent penser à des poèmes en prose – sans doute à cause de leur intensité imaginaire.
Dans sa Saison en enfer, l’autre qui n’est pas lui raconte plusieurs de ses folies, spasp, qui non plus n’est peut-être pas lui, a aussi les siennes. Il semble bien qu’il connaisse lui aussi un enfer. Dans son prologue il précise que « la peur est là », et dans son épilogue : « L’épaisseur de l’angoisse qui monte / me remplit d’une sueur collante ». Pourtant, spasp est un rigolo ! (Voir ci-contre son autoportrait)
Peut-être que sous sa figure on assiste à la métempsychose de Maldoror (puisque dans ce livre il est question de métempsychose). Le célèbre personnage de Lautréamont quitterait ses monstruosités dix-neuviémistes et plutôt marines pour visiter notre XXIème siècle, histoire de les remplacer par nos nouveautés scientifiques et techniques actuelles et surtout à venir. Un Maldoror, donc, réincarné en un spasp, ou du moins habitant son âme pendant le temps d’une écriture.
Maldoror pourra, avec l’auteur, être aspiré par l’écran de son ordinateur pour entrer dans une autre dimension, il pourra faire l’acquisition à Ha Noi d’une pièce de monnaie qui lui garantira de se déplacer dans une zone d’ombre (qui peut-être l’engloutira ?).
spasp, Aphrodite Lamaï et Verkoff l’enjôleur, éd. Ubik art, 118 pages, 15 euros – avec des illustrations de l’auteur.
Sous le moindre prétexte il se trouvera doté d’une paire d’ailes diaphanes qui l’enverra virevolter dans les airs, et plus d’une fois il se retrouvera cosmonaute embarqué pour un voyage fort risqué. À moins que, catapulté malgré lui dans la Thaïlande qu’il a connue, une main le pousse dans la cabine d’un salon de massage, thaïlandais donc, où l’attend une forme féminine assise en lotus...
Car, à travers ces diverses tribulations, notre narrateur connait des enthousiasmes amoureux qui malheureusement ne parviennent pas à se résoudre. Ou si c’est le cas, comme dans le salon de massage thaïlandais, il arrête son récit au moment où l’on pourrait lire : ils furent heureux et ils n’eurent aucun enfant. On saura seulement que la belle des belles, l’objet de la quête d’amour qui traverse l’ensemble du livre, pourrait s’appeler Lamaï ; ou Aphrodite.
On l’aura compris, empruntant à la poésie comme à la science-fiction, ce livre est particulièrement déjanté, ce qui fait sa belle singularité. Il n’a rien de gratuit. L’auteur écrit sur son site : « Je parle des mots, plutôt je lance des mots comme des idées qui fusent. Il y en a qui reviennent avec un effet de boomerang et qu’il faut éviter à tout prix. Le danger est partout. »