Sylvie Durbec, Autobiographies de la faim

À qui appartient cette robe d’enfant sans corps, sans visage qui parcourt le texte ? On sent tout au long du récit un drame, une douleur, une histoire lourde de vie et de mort entre enfance et vieillesse, lucidité et folie. L’énigme de la robe abandonnée sur un panneau au bord de la route comme un point aveugle.

Les âges se mélangent, les époques, les lieux, les personnages, la mère, la fille, le père… selon un jeu de calques qui glissent les uns sur les autres au fil des souvenirs, des sensations, des visions réelles ou imaginaires. Les mots eux-mêmes glissent, se contaminent par proximité, promiscuité, de manière non linéaire, par simples proliférations sonores comme si les mots s’aimantaient pour faire naître, renaître des histoires.

« La mémoire pue » revient en leitmotiv à la fin du récit. Pue quoi ? La mort ? Entre pourriture et nourriture, fin et faim, faim et pain, le x ou le z des bretelles de la robe, les lettres ouvrent des boîtes sans fond, à double paroi où on voit l’autre, où on se voit, je et non je. On flotte, on ne sait plus dans quelle couche de mémoire, dans quelle histoire on se trouve, sous quelle pelure.

Sylvie Durbec, Autobiographies de la
faim, 
éditions Rhubarbe, août 2019,
8 euros.

Le titre au pluriel n’élude pas la part autobiographique du récit. Mais de quelle faim s’agit-il ? De celle du ventre, du cœur, de l’âme ? De celle, ontologique, que les mots jamais ne pourront combler, si profus, délirants soient-ils ? Vit-on à jamais sans corps, dans des vêtements flottants, comme exilé à soi-même ? Autant de ramifications narratives, existentielles, autant d’interprétations possibles dans ce beau texte très personnel de Sylvie Durbec. Un récit-poème en prose qui donne matière à penser, à discuter. Notamment sur la création poétique.

Présentation de l’auteur

Sylvie Durbec

Sylvie Durbec est née à Marseille.

Poète, plasticienne, traductrice.

2008 Prix Jean Follain pour Marseille, éclats et quartiers, édition Jacques Brémond, publié en 2010.

2014, Prix Laurent Terzieff , texte Nathalie Guen, dessins Sylvie Durbec pour le court Smouroute va à la cuisine .

2017 

Bascoulard/Opalka, Propos2 éditions, 

L’ignorance des bêtes, La main qui écrit, 

 2018 

(bien diffcile de) Transformer la jalousie en ballon rond, éditions le Phare du Cousseix, 2018

Comment faire, editions Lanskine, collection petit bric à brac, 

Pooki c’est ponk, texte Édith Azam, dessins Sylvie Durbec

Bouger les lignes avec la poète Florence St Roch, éditions du Museur

Comment faire, avec le peintre Gérard Eppelé, éditions du Museur

 

Sylvie Durbec

Derniers livres publiés

  • Territoires de la folie, deux récits consacrés à Robert Walser et Louis Soutter, éd. Cousumain, 2006
  • Marseille éclats et quartiers, éd. Jacques Brémond, 2009, prix Jean Follain
  • Chaussures vides, Carnets du dessert de Lune, 2010 – traduit en italien : Scarpe vuote, édizioni Joker, janvier 2014
  • Prendre place, éditions Collodion, 2010
  • Ce rouge qui brillait, Soutine, Atelier du Hanneton, 2011
  • La lessive de la folie, remue.net, 2011
  • la Huppe de Virginia, Ed. Brémond, 2011.
  • Le paradis de l’oiseleur, Al Manar, 2013
  • Prix Laurent Terzieff 2014, texte Nathalie Guen, dessins Sylvie Durbec pour le court métrage Smouroute va à la cuisine, publication du livre et du DVD chez Vagamundo en  mars 2015.
  • SANPATRI, aux éditions Jacques Brémond, octobre 2014
  • Route d’avril, vif tambour, novembre 2014, l’Atelier du hanneton
  • Fugues, éditions Propos2 campagne, 2015
  • L’idiot(e) devant la peinture, éditions Propos2 campagne, 2015

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