1.
C’est une vision un esprit fou
accroupi sur sa branche
qui se griffe les joues
de nuit
de jour
il jette parfois très loin
des mots amers
d’admirables jurons
portés par le vent
happés par la mer
et ça brille
dedans la nuit
2.
Voilà que pendent les restes du monde
défroqués jusques à la moelle
voilà ces faux visages
qui ne disent même plus rien
et transpirent de regards morts
et puis voilà ce qu’on ne voit plus
de brefs sourire miteux
comme des oiseaux en cage
et puis
le vent n’a pas tout dit
il reste de quoi pleurer
il reste de quoi frémir
et peut-être qu’au fond
ce ne serait que ça
un peu d’air frais dans les cheveux
un peu de vide dans la caboche
un brin de rien au fond des yeux
3.
À trop regarder les étoiles
j’ai comme un vide au fond des yeux
sur les parkings où dort la neige
les vieux loups blancs sont morts de trouille
mais à la nuit toujours viendra le jour
et toi t’es là dans cette rue
comme le chat gris du vieux faubourg
4.
L’aube sur son radeau
s’accroche au toit du monde
l’horizon vêtu de bleu
referme ses volets
il y a entre les deux
quelques gouttes d’existence
et ce vent rageur
qui tente de crier
un mot
5.
J’ai tant crevé les nuits
au travers des carrefours
à visiter les ombres
de l’homme à l’insecte
qui arrache sa peau
mon âme est quelque part
au-dessus de ma tête
ma poésie n’est rien de plus
qu’un tas dégueulasse
6.
Crac
noir
dehors dedans
la nuit qui fait crever
Plop
blanc
lumière d’aurore
entre les yeux
Crac
Plop
noir blanc
noir
à l’infini
7.
J’ai dit mille fois les mots
un par un
peut-être trop bas
ou peut-être trop mal
mais je les ai dits bon sang
alors pourquoi
ne les vois-je pas briller
là-haut dans le noir
où sont-ils dis-moi
sont-ils restés dedans ma tête