Tunnel, et autres poèmes
TUNNEL
Il te faudra toujours
et avant toute chose
traverser un tunnel,
bien plus long
chaque fois.
Traverser le tunnel,
goûter à ces plaisirs
lumineux, éphémères.
Les sentir s’évanouir.
Repartir.
Mai 2012
MONTICULE
Espoirs déçus,
amères rancunes,
froides colères
forment un charmant monticule
dans lequel on se prélasse à l’envi,
bouche de travers,
yeux mi-clos.
Il n’y a pas foule ici.
La foule préfère le sucre,
les paillettes, les notes claires.
La terre noire colle aux semelles
et les limaces se traînent
magnifiquement.
Cela ressemble à un automne sans fin,
pluvieux, plaintif.
L’odeur des feuilles pourrissantes
prend à la gorge.
Les nouveaux venus
aimeraient repartir,
mais la nuit tombe
et le chemin s’efface.
Juin 2012
TRAINS
Les voyageurs munis d’un billet
savent l’heure, le numéro de la voiture.
Nous attendons bras ballants,
perdus, indécis.
Notre train est-il déjà passé ?
Serait-ce celui qui entre en gare ?
Nous hésitons
et déjà les portes se referment.
Juillet 2012
ANGES
Voix
Silence silence
L’air se déplace
Voix douces et caressantes
graves et caressantes
Les cris se sont tus
C’est un violoncelle qu’on entend
le long du mur
Une plainte qui ne rend pas triste
Une mélancolie qui n’a jamais tué personne
Les anges nous espionnent
et se rient de nous
quand nous tremblons
les jours de brume
entre chien et loup
C’est le moment qu’ils préfèrent
Voix
Silence silence
L’air se déplace
Et avec lui
un parfum délicat
qui se meurt aussitôt
Un beau parfum de ciel
Berlin, août 2012
BERLIN
Envoyez la musique !
Cessons de nous morfondre.
Encore deux heures à vivre.
N’ont-ils pas une chance formidable,
ces passants nés ici ?
Toi aussi, tu penses à ta petite province, dis ?
Aux trois ou quatre notables
qui accrochent des plaques commémoratives
font venir de la capitale un grand artiste,
lèvent leur verre comme leur père,
bégaient, bégaient, bégaient.
Berlin, août 2012.